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Bœuf-laitier: de la salle de traite au parc d'engraissement 🎙️

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Cet article est le premier d’une sĂ©rie qui explorera les opportunitĂ©s et les dĂ©fis liĂ©s aux veaux issus du croisement bĹ“uf-laitier avec des perspectives de l’ensemble de la chaĂ®ne de valeur, y compris le producteur primaire, l’Ă©leveur de bovins d’engraissement, le parc d’engraissement et le transformateur.

Dans tout le pays, un nombre croissant de veaux issus du croisement bĹ“uf-laitier provenant du Canada et des États-Unis apparaissent dans les parcs d’engraissement canadiens, ce qui suscite des prĂ©occupations raisonnables chez de nombreux producteurs vache-veau. L’une de leurs prĂ©occupations est de savoir comment leurs veaux d’engraissement vont concurrencer les veaux croisĂ©s bĹ“uf-laitier, moins chers, pour les espaces dans les parcs d’engraissement.

Dans cet article, le terme « bœuf-laitier » désigne un animal dont la mère est laitière et le père est un taureau de boucherie.

Kolk Farms dairy beef at bunk
Bovins bĹ“uf-laitier d’engraissement chez Kolk Farms Ltd.

Au Canada, la demande pour une production laitière plus efficace a conduit Ă  une sĂ©lection gĂ©nĂ©tique intense pour identifier les gĂ©nisses laitières de remplacement les plus productives. Grâce aux progrès de la technologie de l’insĂ©mination artificielle, la semence sexĂ©e est devenue un outil couramment utilisĂ© dans le cadre de cette initiative. L’utilisation de la semence sexĂ©e des meilleurs taureaux laitiers a permis aux producteurs laitiers de produire des gĂ©nisses de remplacement optimales Ă  partir de leurs meilleures vaches laitières. Les vaches laitières gĂ©nĂ©tiquement infĂ©rieures doivent toujours ĂŞtre accouplĂ©es et vĂŞler pour produire du lait, mais ces veaux ne sont pas conservĂ©s pour la reproduction et sont finalement destinĂ©s Ă  la production de viande de veau ou de bĹ“uf. Cependant, les veaux laitiers de race pure (quelle que soit leur race) ne font pas des animaux de boucherie idĂ©aux.

En termes de structure, un animal laitier a Ă©tĂ© sĂ©lectionnĂ© pour concentrer son Ă©nergie sur la production de lait et non sur les caractĂ©ristiques de la carcasse. Dans le passĂ©, un animal strictement laitier n’Ă©tait pas aussi performant dans un parc d’engraissement qu’un animal de boucherie traditionnel. L’un des moyens d’amĂ©liorer le caractère « bĹ“uf » d’un animal laitier est de croiser des vaches laitières avec un taureau de boucherie. Ce faisant, l’animal bĹ“uf-laitier produit sera plus tolĂ©rant aux conditions climatiques, grandira plus vite, sera plus efficace sur le plan alimentaire, n’aura pas besoin d’ĂŞtre nourri aussi longtemps et produira plus de bĹ“uf qu’un animal laitier de race pure.  

Ces animaux de croisement bĹ“uf-laitier, bien qu’amĂ©liorĂ©s sur le plan gĂ©nĂ©tique, prĂ©sentent quand mĂŞme des dĂ©fis. La gestion des veaux bĹ“uf-laitier varie d’une exploitation Ă  l’autre. Toutefois, une attention particulière doit ĂŞtre accordĂ©e aux soins prĂ©coces de ces veaux afin de leur donner la meilleure chance au parc d’engraissement.  

Leighton Kolk, Kolk Farms Ltd, Iron Springs, Alberta  

Leighton Kolk and his dairy-beef crossed calves in Iron Springs, Alberta
Leighton Kolk, Kolk Farms Ltd.

Il y a trois ans, Leighton Kolk a commencĂ© Ă  s’approvisionner en veaux croisĂ©s bĹ“uf-laitier aux États-Unis et au Canada. En raison de la taille des troupeaux laitiers amĂ©ricains, les Ă©levages de veaux ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©s pour prĂ©parer les veaux laitiers mâles sous-Ă©valuĂ©s aux parcs d’engraissement. M. Leighton explique que les ranchs auprès desquels il s’approvisionne fournissent du colostrum pendant trois jours (parfois mĂŞme deux heures après la naissance), suivent un protocole de vaccination, castrent et Ă©cornent les veaux avant de les vendre Ă  l’âge de six mois.

M. Leighton explique que son exploitation a mis en place une base de donnĂ©es pour suivre les performances des bovins bĹ“uf-laitier d’engraissement, car « une ration Ă©nergĂ©tique trop Ă©levĂ©e en dĂ©but de vie peut provoquer des atteintes hĂ©patiques, et nous voulons ĂŞtre en mesure d’en assurer le suivi ». Il ajoute que les croisements bĹ“uf-laitier prennent Ă©galement plus de temps Ă  finir (jusqu’Ă  un an) et n’ont pas toujours le mĂŞme rendement qu’un animal de boucherie.

En raison du caractère saisonnier de l’Industrie canadienne du bĹ“uf, il y a un afflux de veaux d’engraissement traditionnels sur le marchĂ©, gĂ©nĂ©ralement Ă  l’automne. M. Leighton indique que cela peut reprĂ©senter un dĂ©fi pour les parcs d’engraissement et compare un parc d’engraissement Ă  un hĂ´tel. « Pour gagner de l’argent, un hĂ´tel doit fonctionner Ă  plein rĂ©gime toute l’annĂ©e », explique-t-il. « Il ne peut pas se contenter de la saison la plus active pour assurer le succès de son activitĂ©. Un parc d’engraissement est un scĂ©nario similaire; les bovins bĹ“uf-laitier d’engraissement peuvent ĂŞtre achetĂ©s tout au long de l’annĂ©e pour remplir les enclos lorsqu’il n’y a pas autant d’animaux de boucherie disponibles. »  

Kolk Farms dairy-beef
Bovins bĹ“uf-laitier d’engraissement chez Kolk Farms Ltd.

Selon M. Leighton, l’alimentation des veaux croisĂ©s bĹ“uf-laitier au Canada peut ĂŞtre considĂ©rĂ©e comme une victoire pour la durabilitĂ© des secteurs laitier et du bĹ“uf. « Pour le secteur laitier, l’utilisation de ces animaux pour produire un animal d’engraissement croisĂ© dont les performances sont bien meilleures que celles d’un bouvillon laitier de race pure fait passer ces animaux d’un produit sous-Ă©valuĂ© Ă  un produit de plus grande valeur. Pour le secteur de l’alimentation animale, ces animaux se faisaient nourrir quelque part de toute façon. En ajoutant la gĂ©nĂ©tique du bĹ“uf, l’efficacitĂ© alimentaire est amĂ©liorĂ©e, passant d’une conversion alimentaire de 8:1 dans un Holstein de race pure Ă  une conversion de 7:1 dans un bouvillon croisĂ©, ce qui se traduit par trois Ă  quatre livres d’aliments en moins chaque jour. »

L’une des plus grandes prĂ©occupations des producteurs vache-veau est que les bovins croisĂ©s laitier-bĹ“uf d’engraissement prendront les places de leurs veaux dans les parcs d’engraissement. Selon M. Leighton, ce n’est pas le cas si l’on prend une perspective d’ensemble.

« Les bovins de race purement bouchère sont toujours plus prisĂ©s, et les exploitants de parcs d’engraissement paieront plus cher. Continuez Ă  produire du bon bĹ“uf, et vous serez payĂ© quoi qu’il arrive. Le remplacement d’un animal de boucherie ne raconte pas toute l’histoire. » 

— Alberta dairy-beef producer Leighton Kolk
dairy-beef animals at feed trough
« Les bovins de race purement bouchère ne seront jamais remplacĂ©s, mais les croisements bĹ“uf-laitier demeureront probablement 20 Ă  30 % de notre exploitation », dĂ©clare Leighton Kolk, producteur de l’Alberta.

Depuis 2003, le cheptel de vaches est en dĂ©clin dans toute l’AmĂ©rique du Nord. « Nous voulons toujours une industrie du bĹ“uf et une industrie de conditionnement en bonne santĂ©. Nous sommes un pays exportateur, nous voulons toujours produire du bĹ“uf nourri au grain, de grande valeur, aux caractĂ©ristiques de carcasse Ă©levĂ©es, savoureux et juteux, comme le veulent nos clients. Nous sommes bons pour le faire d’une manière durable ici au Canada. Si nous continuons Ă  faire fonctionner ce système, nous continuons Ă©galement Ă  faire fonctionner d’autres industries – le secteur de l’alimentation animale, la main-d’Ĺ“uvre, le camionnage, les biocarburants, etc. Si nous ne remplaçons pas le troupeau de vaches, nous dĂ©clinons, ce qui peut nous rendre moins compĂ©titifs. »

Leighton dit qu’ils ont reçu un peu de rĂ©sistance de la part des usines parce que la carcasse de vache purement laitière n’est pas la mĂŞme que celle d’un bovin de boucherie; les rendements peuvent ĂŞtre infĂ©rieurs Ă  ceux d’un animal de boucherie. 

Russ Mallard, Atlantic Beef Products Inc, Albany, Î.-P.-É. 

Atlantic Beef Products Inc. (ABPI), situĂ©e Ă  Albany, sur l’ĂŽle-du-Prince-Édouard, est la seule usine de transformation du bĹ“uf inspectĂ©e par le gouvernement fĂ©dĂ©ral dans le Canada atlantique. L’usine transforme principalement des bovins provenant du Canada atlantique, mais doit parfois complĂ©ter sa production avec des bovins du QuĂ©bec et de l’Ontario. 

Russ Mallard est le prĂ©sident d’ABPI, le prĂ©sident actuel de BĹ“uf Canada, le levier de marketing de l’Agence canadienne de prĂ©lèvement du bĹ“uf, et le vice-prĂ©sident du Conseil des viandes du Canada. Selon l’expĂ©rience de Russ en matière de transformation du « bĹ“uf-laitier » Ă  l’usine, « les bouvillons Holstein, s’ils sont nourris correctement dès le dĂ©but de leur cycle de vie, auront un meilleur rapport viande-os que les veaux Holstein qui ne sont pas nourris correctement ».

GĂ©nĂ©ralement, les Holstein de race pure n’ont pas la masse musculaire d’un croisement bĹ“uf-laitier et, par consĂ©quent, ont des faux-filets et des contre-filets plus minces. C’est pourquoi le bĹ“uf Holstein sur le rail est dĂ©cotĂ© en consĂ©quence. Les bovins issus de croisement bĹ“uf-laitier sont plus musclĂ©s et ne sont pas dĂ©cotĂ©s.

Comparaison de faux-filets provenant A) de bœuf conventionnel, B) de croisés bœuf-laitier et C) de vaches laitières conventionnelles
A comparison of strip loins from  conventional beef, dairy-beef cross and conventional dairy
Source: Dale R. Woerner et al. 2022

Les sept premiers jours de la vie d’un veau bĹ“uf-laitier sont très importants pour le prĂ©parer Ă  devenir un bon bovin bĹ“uf-laitier d’engraissement. Il est essentiel, entre autres, de veiller Ă  ce que les veaux nouveau-nĂ©s reçoivent un colostrum de bonne qualitĂ©, d’utiliser correctement les antibiotiques et de respecter les dĂ©lais d’expĂ©dition pour assurer leur rĂ©ussite Ă  long terme dans le parc d’engraissement.

Outre l’installation de transformation, Atlantic Beef Products exploite Ă©galement Triple H Farms Inc. un parc d’engraissement de 800 tĂŞtes, Ă©galement situĂ© Ă  l’ĂŽle-du-Prince-Édouard. Bruce Andrews, vice-prĂ©sident des opĂ©rations d’ABPI, supervise Ă©galement le parc d’engraissement. « L’objectif du parc d’engraissement est d’approvisionner l’usine en bĹ“uf lorsque le bĂ©tail local n’est pas disponible », explique Bruce. « Nous engraissons principalement des veaux croisĂ©s bĹ“uf-laitier et des bovins de boucherie. Nous avons aussi une expĂ©rience directe avec les veaux laitiers, et nous savons qu’il est plus difficile de les Ă©lever avec succès, en particulier s’ils ne bĂ©nĂ©ficient pas d’un bon dĂ©part avec le colostrum, de vaccinations opportunes et d’un mĂ©lange d’aliments pour animaux appropriĂ©.

« Bob calf » (« jeune veau ») est un terme utilisĂ© dans l’industrie pour dĂ©signer les veaux âgĂ©s de moins de 30 jours et qui peuvent ĂŞtre de race laitière ou un croisĂ© bĹ“uf-laitier.

« Nous savons qu’une grande valeur peut ĂŞtre ajoutĂ©e au secteur agricole de l’Ă®le si les veaux laitiers peuvent rester ici pour ĂŞtre nourris, plutĂ´t que d’ĂŞtre expĂ©diĂ©s hors de l’Ă®le pour la production de viande de veau », explique Bruce. « Les recettes monĂ©taires agricoles peuvent augmenter et rester locales, et le fumier reste Ă©galement local, ce qui profite aux producteurs de pommes de terre. »

Russ ajoute : « En bout de ligne, nous produisons toujours un produit local, et les consommateurs de tout le pays aiment le bĹ“uf de notre rĂ©gion. » Comme dans le reste du Canada, le cheptel de bĹ“ufs du Canada atlantique est en dĂ©clin depuis 2003. « Nourrir les veaux laitiers et les croisĂ©s bĹ“uf-laitier est une façon de s’assurer que l’usine puisse continuer Ă  fournir son service essentiel pour l’industrie du bĹ“uf dans le Canada atlantique. »

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